L’amour en voiture… Fantasme de l’homme ou de la femme ?

Fantasme concrétisé par plus de deux tiers des Français, faire l’amour en voiture revêt une dimension psychologique plus complexe qu’il n’y paraît, à la fois pour l’homme et pour la femme.

« A l’arrière des berlines, on devine, des monarques et leurs figurines Juste une paire de demi-dieux, livrés à eux. Ils font des p’tits, ils font des envieux. A l’arrière des dauphines, je suis le roi des scélérats, à qui sourit la vie. Marcher sur l’eau, éviter les péages. Jamais souffrir, juste faire hennir, les chevaux du plaisir. Osez osez Joséphine, osez osez Joséphine… » Ecrite en 1991, la chanson d’Alain Bashung traduit aujourd’hui encore toute la dimension érotique et la charge sensuelle de l’amour en voiture, pour les personnes des deux sexes. A son image, certaines scènes mythiques de films restent gravées dans l’inconscient collectif : La main de Kate Winslet s’abandonnant dans Titanic sur la vitre embuée d’une Renault 1912. (Véhicule à l’époque plus habitué à la bienséance guindée de la haute-bourgeoisie anglosaxonne qu’à l’éveil des sens des jeunes amoureux) ou encore des ébats bestiaux d’une Sabine Azéma et d’un Eddy Mitchell en pleine force de l’âge, dans Le bonheur est dans le pré.
Fantasme commun qui alimente les forums de discussion tels que doctissimo.fr ou aufeminin.com en conseils et témoignages plus ou moins crus et détaillés, la sexualité en voiture se concrétiserait pour plus de deux tiers (69,5 %) des Français.
Basique et spontané, cet élan a une portée universelle. « Qui n’y a jamais pensé ? Tout le monde aime ce fantasme. Cette idée du là, maintenant, tout de suite », commente Sandra, 23 ans, interrogé sur la question.
Claire, 27 ans, confie quant à elle avoir déjà fait une fellation à son petit ami au volant « parce que c’était rigolo et qu’en plus les hommes adorent ».
Si, très souvent, c’est la femme qui donne l’impulsion à la volupté, « faire l’amour en voiture est avant tout un fantasme propre à l’homme. Ce n’est pas un fantasme féminin à la base,  explique Habiba Chalaal, psychothérapeute et chargée de cours à l’Université de Caen. La voiture représente la toute puissance phallique, synonyme de force, de vitesse, de puissance. Dans cette mesure, elle constitue un prolongement du corps. La femme est investie comme un objet soumis à l’homme, ce qui n’empêche pas qu’elle y prennent du plaisir ». Une analyse confirmée par le psychiatre et sexologue Gérard Tixier. « Pour l’homme, la voiture, véhicule censé se propulser, relève de la symbolique virile tout en étant aussi un contenant utérin. Pour la femme, c’est plus un espace protecteur ».  
Ce qui justifie aussi l’image de la voiture comme cocon pour les jeunes adultes en mal d’endroits où satisfaire leurs désirs. « Cependant, ce n’est pas parce que le sexe en voiture est plus pratiqué entre 20 et 30 ans qu’il est moins fantasmé entre 30 et 40, précise Mme Chalaal. C’est ce que l’on voit avec les couples qui ont des aventures hors mariage ou les divorcés qui reprennent ce genre de pratiques, que l’on trouve rarement auprès des couples installés. Il faut tout de même préciser que quand on fait l’amour en voiture, on ne fait pas l’amour, dans le sens où l’on est dans l’impossibilité de s’abandonner totalement à l’autre, la peur d’être surpris jouant un rôle de court-circuit en quelque sorte. C’est le fantasme qui est assouvi en premier lieu ».
D’où provient alors cette envie pulsionnelle de l’autre ? Selon Habiba Chalaal, elle est liée à l’infraction de l’interdit, prédominant.
« L’exhibition a valeur de transgression de la loi. Elle excite le côté de la perversion sexuelle, étape de la régression infantile par laquelle nous passons tous et qui fait partie de notre évolution. Voilà pourquoi c’est une pratique de jeunes, au-delà des cas de figures tels que l’adultère ou la prostitution. Risquer d’être puni, c’est rejouer les interdictions infantiles. Le tout est de dépasser cette étape. La pathologie ne commence qu’avec le caractère unique du fantasme ».
A noter que le délit d’exhibition sexuelle est puni par le code pénal d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, même si, dans les faits, les condamnations sont rares et les juges compréhensifs.

Pour en savoir plus sur le sujet, voir les ouvrages de Philippe Brenot :

Les femmes, le sexe et l’amour (2012, éd. Les Arènes), Les hommes, le sexe et l’amour, (2012, Marabout éd. Poche), ainsi que Le sexe et l’amour (2010, Odile Jacob) .